Urbanisme : les ordonnances sur les Scot et la hiérarchie des normes sont publiées

Au lendemain de leur présentation en conseil des ministres, l’ordonnance sur la modernisation des schémas de cohérence territoriales (Scot) et celle sur la rationalisation de la hiérarchie des normes applicable aux documents d’urbanisme, prévues par l’article 46 de la loi Elan, ont été publiées au Journal officiel ce 18 juin. Elles ont toutes deux donné lieu à une large concertation avec les parties prenantes (élus, services de l’État et des collectivités, acteurs privés, ONG), notamment à travers la démarche « Planifions nos territoires ensemble » menée en 2019.
La première ordonnance adapte l’objet, le périmètre et le contenu du Scot afin de tirer les conséquences de la création du schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet) et du transfert de la compétence en matière de plan local d’urbanisme (PLU) aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, avance son rapport de présentation.
Pour rappel, le Scot, créé par la loi Solidarité et renouvellement urbains (SRU) en 2000 et élaboré à l’initiative des élus des collectivités territoriales, est un document de planification stratégique à long terme, destiné à servir de cadre de référence pour les différentes politiques sectorielles, notamment celles centrées sur les questions d’organisation de l’espace et d’urbanisme, d’habitat, de mobilités, d’aménagement commercial, d’environnement, etc. L’objectif de l’ordonnance est d’en faire « un exercice moins formel, plus politique, et de faciliter la mise en œuvre du projet territorial ainsi que le passage à l’action », souligne le rapport. Les travaux de concertation qui ont été menés ont abouti à la nécessité de faire évoluer le périmètre, le contenu et la structure du Scot, afin d’accroître la cohérence entre les thématiques traitées et de rendre plus lisible le projet stratégique, poursuit-il.

Le contenu du Scot largement revu

Désormais, seules les intercommunalités ont l’initiative de l’élaboration d’un Scot, l’ordonnance supprimant la possibilité qu’avaient les communes de le faire. Les articles 1er à 6 du texte reprennent la rédaction d’une partie du code de l’urbanisme concernant le Scot, en particulier les articles L. 132-12 à L. 132-13 de la section 5 du chapitre II, titres III et livre Ier, relatifs à la consultation, puis le chapitre Ier relatif au contenu du Scot. La collectivité en charge du Scot pourra désormais associer à son élaboration ou à sa mise en oeuvre les représentants de tout organisme public ou privé dont la participation sera jugée opportune comme, par exemple, les associations d’usagers ou celles de défense de l’environnement.
L’article 3 de l’ordonnance prévoit la suppression du rapport de présentation et renvoie en annexe ses principales composantes – le diagnostic, l’évaluation environnementale, la justification des choix, ainsi que l’analyse de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers et la justification des objectifs chiffrés de limitation de cette consommation. La justification de l’articulation avec les documents de rang supérieur est supprimée.
Le projet d’aménagement stratégique remplace le projet d’aménagement et de développement durables (PADD) et devient la première pièce du schéma. Le document d’orientation et d’objectifs est quant à lui simplifié, avec cinq sous-sections au lieu de onze auparavant, dans le sens d’une plus grande cohérence entre les thèmes traités. Plusieurs documents qui composent le Scot se retrouvent dans une partie dénommée « annexes », définie dans une section 3. A l’article L. 141-15 du code de l’urbanisme figurent les éléments de l’ancien rapport de présentation.
Les dispositions concernant l’élaboration d’un Scot valant plan climat-air-énergie territorial (PCAET), au sens du code de l’environnement sont inscrites dans une sous-section 1, aux articles L. 141-16 à L. 141-18, et un volet mise en œuvre du schéma est également créé, dans une sous-section 2, à l’article L. 141-19.
L’article 4 modifie le chapitre II du code de l’urbanisme relatif aux effets du schéma, pour tenir compte de l’approbation du plan d’aménagement et de développement durable de Corse. L’article 5 modifie le chapitre III en faisant évoluer le périmètre du Scot au bassin d’emploi au lieu du bassin de vie, et en renforçant la prise en compte des déplacements, par l’intégration des bassins de mobilité (articles L. 143-3 à L. 143-6). Il prévoit qu’un débat sur le périmètre ait lieu lors du bilan à six ans du schéma, lorsque ce périmètre coïncide avec celui d’un plan local d’urbanisme intercommunal (article L. 143-28). L’article 6 introduit un chapitre V permettant au projet d’aménagement stratégique de tenir lieu de projet de territoire pour un pôle d’équilibre territorial et rural, à l’article L. 145-1, nouvellement créé. Enfin, plusieurs articles font l’objet d’une renumérotation et d’une adaptation rédactionnelle pour assurer la cohérence avec le nouveau format du Scot, et d’autres sont supprimés ou modifiés, notamment ceux relatifs au chapitre individualisé valant mise en valeur de la mer (articles L. 143-19, L. 143-23 ainsi que les articles L. 141-24 à L. 141-26, remplacés par les articles L. 141-12 à L. 141-14, qui prévoient que des dispositions relatives à la mer et littoral soient intégrées aux orientations du Scot).
Par ailleurs, l’article 7 prévoit l’application de l’ordonnance au 1er avril 2021 et des mesures transitoires pour les schémas en cours d’élaboration ou de révision, avec la possibilité, pour les collectivités qui le souhaiteraient, d’opter pour la révision ou l’élaboration d’un Scot sous le nouveau format, sans attendre l’entrée en vigueur des dispositions de l’ordonnance. Le rapport souligne enfin que les impacts financiers pour les collectivités territoriales seront limités, le texte ne prévoyant qu’une refonte du format du document, avec l’intégration de dispositifs nouveaux mais facultatifs pour les collectivités concernées.

Nouvelles règles en matière de mise en compatibilité des documents d’urbanisme

La deuxième ordonnance parue au Journal officiel ce 18 juin introduit de nouvelles règles en matière de mise en compatibilité des documents d’urbanisme. Il s’agit ainsi de limiter et simplifier les obligations qui imposent aux documents d’urbanisme transversaux (Scot, PLU, documents en tenant lieu et cartes communales), d’être compatibles ou de prendre en compte, lors de leur élaboration, des enjeux et dispositions prévues par d’autres documents programmatiques relatifs à des politiques sectorielles telles que les risques, les continuités écologiques, l’air, les déplacements…, rappelle son rapport de présentation.
Le rôle du Scot comme document intégrateur de toutes les politiques sectorielles ayant un rôle en urbanisme est réaffirmé. Désormais, si un territoire est couvert par un Scot, c’est ce Scot qui doit être compatible avec les différents documents sectoriels. Lors de son élaboration, le PLU devra quant à lui uniquement examiner sa compatibilité avec le Scot et non plus avec tous les autres documents. De plus, quatre documents ne seront désormais plus opposables aux Scot, plans locaux d’urbanisme intercommunaux (PLUi) et cartes communales.
En outre, les liens juridiques entre les documents sectoriels et les documents d’urbanisme sont uniformisés. Tous les liens de prise en compte sont remplacés par des liens de compatibilité. Le lien de prise en compte est exclusivement maintenu pour les objectifs du rapport du Sraddet et pour les programmes d’équipement.
L’ordonnance vise aussi à rationaliser les procédures de mise en compatibilité des documents d’urbanisme lorsque de nouveaux documents sectoriels entrent en vigueur. En fonction des documents sectoriels, les délais pour mettre en compatibilité les documents d’urbanisme pouvaient être différents et imposaient de lancer de multiples procédures en peu de temps. La logique est désormais inversée, souligne le rapport. Tous les 3 ans, les collectivités auront à vérifier si de nouveaux documents sectoriels sont entrés en vigueur et adapteront en une seule fois leur document d’urbanisme pour prendre en compte tous les nouveaux documents sectoriels ou ceux qui ont évolué. Cette procédure de mise en compatibilité pourra s’opérer par modification simplifiée. Le temps que cette mise en compatibilité se fasse, le document d’urbanisme ne sera exposé à aucun contentieux qui résulterait de sa non mise en compatibilité. Par exception, le délai de mise en compatibilité d’un PLU avec un Scot est d’un an.
Enfin, la note d’enjeux telle qu’elle est pratiquée par certains services de l’État pour accompagner les collectivités territoriales dans l’élaboration de leur document est introduite. Par cette note, le représentant de l’État dans le département transmet aux auteurs des Scot et des PLUi, indépendamment de son porter à connaissance, un exposé faisant état des enjeux qu’il identifie sur leur territoire et que le document d’urbanisme est appelé à traduire. Ce document entend ainsi renforcer le dialogue entre l’État et la collectivité en amont de l’élaboration du document d’urbanisme. Cette note n’a toutefois pas vocation à constituer un acte de procédure de l’élaboration du document d’urbanisme ni à avoir de portée juridique contraignante, y compris vis-à-vis de l’État, qui exercera son contrôle de légalité sans lien avec le contenu de cette note, indique le rapport.

 
Références : rapport au président de la République relatif à l’ordonnance n° 2020-744 du 17 juin 2020 relative à la modernisation des schémas de cohérence territoriale, J.O. du 18 juin 2020, texte n°39 ; ordonnance n° 2020-744 du 17 juin 2020 relative à la modernisation des schémas de cohérence territoriale, J.O. du 18 juin 2020, texte n°40 ; rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance n° 2020-745 du 17 juin 2020 relative à la rationalisation de la hiérarchie des normes applicable aux documents d’urbanisme, J.O. du 18 juin 2020, texte n°41 ; ordonnance n° 2020-745 du 17 juin 2020 relative à la rationalisation de la hiérarchie des normes applicable aux documents d’urbanisme, J.O. du 18 juin 2020, texte n°42.